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1 octobre 2010

Terr'Ativa

écrit le 13/08/10 à Rio de Janeiro, Brésil




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Mardi matin, nous avions rendez-vous dans la zone sud de Rio avec Renata, la coordinatrice générale de l’association Terr’Ativa, et Vera, une de ses amies, francophone, et donc précieuse pour notre communication. L’objet de cette rencontre : faire un point sur le contexte dans lequel agit l’ONG, avant d’aller sur place.

L’association franco-brésilienne Terr’Ativa a été fondée en 1999 et œuvre actuellement dans la favela Morro do Fuba, au nord de Rio de Janeiro. Elle agit auprès des enfants et adolescents, auxquels elle propose diverses activités extra scolaires dans un but d’éducation et d’insertion sociale. En 2007, l’assassinat de ses trois membres fondateurs français par un de leurs collaborateurs – et ancien bénéficiaire de l’ONG – a gelé temporairement les activités de l’ONG. En 2008, de nouvelles équipes se sont formées, en France comme au Brésil, pour poursuivre l’action initiée par Delphine Douyère, Christian Doupes, et Jérôme Faure.

Renata fait partie de cette nouvelle génération. Elle nous explique que seul un programme sur les quatre qui existaient avant le drame a subsisté. Ironie du sort, c’est dans la favela Morro do Fuba, d’où était issu le meurtrier, que Terr’Ativa continue d’agir.

La favela Morro do Fuba se situe dans la zone nord de Rio. Pas la peine de la chercher sur une carte, vous ne la trouverez pas. Elle jouxte Cascadura. D’après les dires de nos interlocutrices, le climat social y est un peu tendu.

Les favelas cariocas ont vu émerger ces dernières années un nouveau phénomène : la création de milices, groupes armés, justiciers sans pitié, qui d’après les explications que l’on a pu recevoir se situeraient à mi chemin entre la mafia, les paramilitaires et les comités d’autodéfense.

Les milices sont composées entre autres d’anciens policiers, et se sont données comme objectif de faire régner l’ordre dans les favelas, sans hésiter à utiliser la violence. La première action a été de chasser les narco-trafiquants. « Il y a deux ou trois ans, nous raconte Renata, un groupe de 300 personnes armées a envahi la favela de Morro do Fuba ; c’étaient les miliciens qui prenaient le contrôle. Pendant trois jours, c’était la guerre dans les rues de la favela. Ils ont chassé les trafiquants. Demandez aux enfants, je peux vous assurer qu’ils se souviendront de ce jour toute leur vie ».

Les miliciens règlementent la vie de la favela. Ils observent les allées et venues de chacun, fixent les heures d’ouverture des magasins, prélèvent les « impôts »…

Dans ce contexte, hors de question pour nous d’arriver avec la caméra au point. Avant de partir au front, nous avons donc acheté un jeu de sacs poubelles, pour la dissimuler…

Trois bons quart d’heure de transport pour nous rendre à Morro de Fuba. D’abord le métro, jusqu’à Central, puis le train de banlieue… Nous finissons à pieds. La terre battue succède au goudron ; au pieds d’une colline dégarnie, commence la favela. La zone où est établie Terr’Ativa est la plus sûre et la plus « riche » du quartier.

La rue qui y mène est bordée de quelques échoppes ; nous longeons un parc pour enfants, agrémenté d’improbables manèges, semblant dater de l’avant-guerre. Un « cadeau » d’un candidat à la chambre des députés de l’Etat de Rio, et issu de la favela. La rue est étonnement vide. Comme si cela coulait de source, Renata nous donne l’explication : « récemment, un des leaders de la milice est tombé. Depuis, la rumeur d’un retour des trafiquants enfle. Aujourd’hui, il y a un risque d’invasion, alors les gens ne sortent pas de chez eux ». Rassurant.

Heureusement, le local de Terr’Ativa se trouve à quelques pas seulement. Nous y entrons, et faisons la connaissance de l’équipe.

Terr’Ativa reçoit entre 50 et 60 enfants, répartis en deux groupes, et 25 adolescents. Comme ils ne vont à l’école qu’à mi-temps, ils viennent passer le reste de la journée ici. Soit le matin, soit l’après-midi, en fonction des horaires de leurs écoles respectives.

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L’après-midi, ils arrivent aux alentours de 14 heures.

Les plus petits commencent par du soutien scolaire, avant de se laisser envouter par la lecture de Fabio, qui les fait ensuite interagir avec pédagogie sur les textes qu’il leur conte.

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Les adolescents se voient eux proposer divers ateliers axés autour des arts plastiques et de la réflexion critique. Aujourd’hui, ils s’exercent à la peinture…

A 15h30, un goûter réunit tous les enfants dans la cour de l’association.

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Les activités reprennent alors jusqu’à 17 heures, heure de la fermeture du local. Pour cette nuit, nous laisserons la caméra sur place.

Mercredi, sport au programme. Nous avons de la chance, le temps, plutôt menaçant le matin, s’est dégagé, les activités auront donc lieu dehors. La caméra traverse la rue à découvert, mais hors de question de faire le moindre plan large. Le terrain de jeu a été enfermé par la milice, dans un soucis d’ordre public.

Les activités sportives se déroulent dans une bonne ambiance ; pour notre deuxième jour, les enfants continuent de manifester une grande curiosité à notre égard, et redoublent d’effort pour communiquer avec nous. La gymnastique cède la place au football, d’abord les exercices, et puis le match libre, un contre tous chez les plus jeunes.

Deux ou trois gamins m’en mettent plein la vue, ils ont un don certain, jeu de corps, conduite de balle et technique ahurissants pour leur gabarit et leur âge…

17 heures, le jeu s’arrête, les enfants partent. Nous restons encore une demie-heure avec la chaleureuse équipe d’éducateurs, qui trinque à l’anniversaire de Renata. Puis nous regagnons le centre, caméra sous le bras… Chapeau à Terr’Ativa, dont l’action nécessite un sacré engagement.

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